Remarque en préambule : tout stress est interdit lors de la lecture de cet article. Les contrevenant(e)s seront fortement réprimandé(e)s. Si vous avez l’impression que ces sujets sont infaisables, notamment si vous lisez cet article au début de vos révisions, détrompez-vous : quelques semaines de boulot seulement vous séparent d’un niveau suffisant pour les affronter !
Remarque bis : l’article a été enrichi avec de nouveaux sujets tombés en 2017et 2018 !
Salut à toutes et à tous !
L’historique des recherches Google menant vers From ENM with love m’indique que beaucoup d’entre vous, chers lectrices et lecteurs, sont curieux d’en savoir plus sur le type de sujets pouvant tomber lors des oraux techniques. C’est tout naturel, que de vouloir savoir à quelle sauce on va manger le jury.
Je me lance donc dans une série de quatre articles recensant et classant les sujets d’annales tombés aux oraux techniques de l’ENM ces dernières années. Je me base sur un document réalisé après les oraux 2015 par des admissibles qui ont compilé les leurs et enquêté pour rassembler le plus de sujets possibles. Si les auteur(e)s de cette belle initiative lisent ces lignes, je leur envoie un gros bisou et je les remercie chaleureusement, au nom des admissibles présent(e)s et futur(e)s. Votre travail de compilation va permettre à des centaines de candidat(e)s de mieux aborder les épreuves orales.
J’ai ajouté les sujets tombés en 2016 dont j’ai eu connaissance et qui ne figuraient pas dans la liste établie en 2015. Il y en a extrêmement peu : vous vous doutez bien que les sujets sont à 99 % les mêmes chaque année. Le droit international privé ou le droit commercial ne connaissent pas de révolution copernicienne qui justifierait d’inventer des sujets tout frais tous les ans.
Nous commençons par le terrible déhipé, une matière souvent redoutée comme la peste. Comme nous allons le voir dans quelques instants, si la matière est en effet la plus technique sur le plan juridique, les sujets des épreuves sont au contraire des « têtes d’affiche » du programme. Bien maîtriser les notions générales et le DIP « thématique » vous permettra bien souvent de vous en tirer avec les honneurs.
Dans les lignes qui suivent, je commence par tenter de déterminer ce qui ne tombera jamais, pas même en question pour devenir grand-prêtre de l’ACDIPSM (Amicale des Connaisseurs de DIP de Seine-et-Marne). Je terminerai par le plus important : les fameux sujets !
Trouver une image pour illustrer le DIP, c’est presque aussi dur que de comprendre le mécanisme du renvoi. Je remercie ce qui ressemble à un cabinet américain douteux pour ce sommet de kitsch virilo-businesso-gnangnan.
Ce qui ne tombera pas
Isaac Newton s’en est aperçu en ramassant une pomme sur la tronche en faisant sa sieste : l’attraction terrestre invite tout corps à tomber. Seuls certains types de sujets résistant à la gravité ne devraient en principe pas tomber, du moins en tant que tels. C’est notamment le cas pour :
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Les notions trop larges : « les conflits de lois », « les conflits de juridictions », « le droit de la nationalité ». Ce sont des pans trop importants du programme, avec lesquels il serait impossible d’établir une problématique, même minimale.
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Les points trop précis : à l’inverse, des éléments pointus, qui inviteraient le/la candidat(e) à une réflexion juridique de haute volée, ne sont pas non plus donnés. Ex. : « l’élément d’extranéité », « la loi du for »… Pas la peine de réviser ce genre de choses dans l’optique de pouvoir tenir dix minutes dessus.
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Des questions : une question suppose l’usage du cerveau ; or, nous savons que cela est impossible lors d’une épreuve en cinq minutes. Pas de « Quels perspectives pour le droit français des étrangers ? » à craindre.
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Des arrêts seuls : oui, le DIP est de construction jurisprudentielle, mais il serait vraiment vache de faire reposer l’exposé sur un seul arrêt. Si c’est le cas, votre plan est tout trouvé : I – Le droit avant l’arrêt / II – Le droit après l’arrêt. A ma connaissance, seul l’arrêt Corneliessen avait donné lieu à un sujet. Bulkley, Munzer, Caraslanis, Forgo, Bisbal et les autres doivent bien sûr être connus, mais pas au point de pouvoir en faire une analyse néo-bartinienne, avec un monocle et une montre à gousset (le style vestimentaire du DIPiste).
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Pas de notions étrangères : vous n’aurez pas de notions de droit étranger en sujet. Bye bye la kafala et la quarte du conjoint pauvre. Toutefois, ces notions sont souvent d’excellents exemples pour illustrer une notion générale du conflit de lois ou de juridictions.
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Pas de doctrine : ce qui va de soi va mieux en le disant. Vous pouvez ranger vos thèses préférées sur le territorialisme hollandais et le renouveau de l’universalisme français au début du XXe siècle (si, si, ça existe). Même en question, vous êtes vraiment à l’abri : on ne vous interrogera que sur du droit positif.
Les annales de sujets en droit international privé
Quels types de sujets tombent lors des épreuves de droit international privé ? La première chose que l’on remarque est qu’il s’agit quasiment uniquement de sujets correspondant aux « têtes de programme », qui pourraient faire l’objet d’un chapitre dans un manuel ou d’une fiche dans un polycopié de prépa. Par conséquent, il s’agit des mêmes sujets tous les ans : la liste qui suit devrait donc vous indiquer la plupart des sujets à venir. Je le rappelle, ils peuvent être donnés à plusieurs candidat(e)s, parfois en changeant un peu la dénomination (ex. : « l’exécution de la décision étrangère » devenant « le juge français et l’exécution de la décision étrangère »).
Petite remarque supplémentaire : le programme affiché sur le site de l’ENM indique que figure au menu « L’application du droit international dans l’ordre juridique interne ». On entend par là Jacques Vabre, Nicolo et tout le toutim. Je me trompe peut-être, et j’invite d’ancien(ne)s admissibles à me le faire savoir si c’est le cas, mais je constate que cette partie ne donne lieu qu’à très peu de sujets. Ce qui est plutôt logique, dans la mesure où elle flirte avec le droit public et que l’épreuve porte le nom de droit international privé. Méfions-nous du traité international qui dort, mais bon…
J’ai fait durer le suspense trop longtemps : place aux sujets ! Je les trie par catégories pour qu’on y voie plus clair.
1 – Les notions générales : ce sont les principales pourvoyeuses de sujets d’oraux, tant en matière de conflits de lois que de juridictions. Ce sont généralement les sujets les plus accessibles – ça tombe bien ! Ils font appel à une connaissance brute du cours, assortie des quelques petits arrêts qui ont permis l’évolution de la notion.
Conflits de lois :
– L’autorité des règles de conflit de lois
– L’accord procédural
– Les lois de police
– Le renvoi
– L’ordre public international
– L’exception d’ordre public / Les effets de l’exception d’ordre public
– L’opération de qualification en DIP
– La fraude à la loi
– La preuve du contenu de la loi étrangère
– L’interprétation de la loi étrangère / Le juge et l’application de la loi étrangère
– Le fait juridique en DIP
– Le juge et la détermination de la loi applicable
– Le contrôle de l’application de la loi étrangère par le juge
– Le contrôle de l’interprétation de la loi étrangère
– Les conflits de lois dans le temps
– Le rattachement du statut personnel
– Le statut individuel
– Le statut familial
Conflits de juridictions et exécution :
– La compétence juridictionnelle de droit commun
– L’exécution des décisions étrangères
– L’exequatur
– Les conséquences de l’arrêt Corneliessen
– Le titre exécutoire européen
– La clause attributive de juridiction
– La reconnaissance des décisions en DIP
– Le forum shopping
2 – Le DIP thématique : à les lire comme ça, devant votre écran, vous devez sans doute les trouver moyennement enthousiasmants, voire carrément flippants. Certains sont en effet aussi accueillants qu’un rottweiler qui grogne dans sa niche, mais après plusieurs semaines de révisions, on arrive à les dompter. Les connaissances sont à réunir sont un peu plus nombreuses, mais le plan est souvent simplissime : avant le règlement européen/après le règlement européen. Enfin, le Meyzeaud-Garaud est absolument impeccable sur toutes les applications matérielles du DIP.
– Le mariage et le divorce en DIP (j’ai comme l’impression que vous tenez vos deux parties…)
– Filiation en DIP
– Régimes matrimoniaux et DIP
– Biens en DIP
– Successions en DIP
– Aliments et droit international privé
– La loi applicable aux délits
– La loi applicable aux obligations
– Contrats en droit international privé
– La loi applicable au mariage et au divorce
– Loi applicable et juge compétent en matière d’obligations
– Loi applicable et juge compétent en matière de délits
3 – Le droit de la nationalité et la condition des étrangers : cette partie donne lieu à peu de sujets, car elle est assez courte. Les rares exemples correspondent exactement aux titres des chapitres de manuels.
– L’attribution de la nationalité française
– L’acquisition de la nationalité française
– La perte de la nationalité française
– L’entrée et le séjour des étrangers sur le territoire français
– La notion de condition des étrangers
4 – Les textes importants : les grands textes de droit interne ou européen peuvent constituer l’intitulé d’un sujet. I – La convention antérieure / II – Le règlement. Oups, désolé(e), c’est sorti tout seul (les vieux réflexes…). Par contre, aucune Convention de la Haye n’a été donnée en tant que telle à ma connaissance. Il faudra les évoquer en DIP thématique, en fonction de votre sujet.
– Les articles 14 et 15 du Code civil
– Le règlement Bruxelles I
– Le règlement Bruxelles I bis
– Le règlement Bruxelles II bis
– Le règlement Rome I du 17 juin 2008
– Le règlement Rome II du 31 juillet 2007
– Le règlement Rome III du 20 décembre 2010
– Le règlement “obligations alimentaires”
5 – Questions de société ou d’actualité judiciaires liées à une problématique de DIP : ce sont des sujets « d’actualité », mais ils sont extrêmement peu nombreux. Pour preuve, je n’en dénombre qu’un seul, à moins que certains m’aient échappés. C’est un « faux » sujet de DIP : on peut mobiliser les connaissances de droit civil et de droit EDH pour construire l’exposé (hello, Ménesson et Labassée).
– La gestation pour autrui en DIP
– L’Union européenne et le droit international privé
Vous vous demandiez à quoi ressemblaient Sylvie et Dominique Ménesson ? Les voici dans l’intimité de leur salon. (C’est vraiment très dur d’illustrer un article sur des sujets de DIP).
Vous connaissez désormais les sujets tombés – et donc les sujets probables – en droit international privé. En tant que juriste débutant(e), j’avais particulièrement galéré et perdu mes nerfs à apprendre cette matière, mais au final, ce ne sont pas nécessairement les sujets les plus durs.
Je me jette à l’eau : il est même parfaitement raisonnable et censé d’espérer tomber sur le DIP plutôt que sur le DUE. Voilà, c’est dit !
A très bientôt pour une rencontre endiablée avec les sujets de droit européen !
From ENM, with love
P.S. : vous êtes un(e) vénérable admissible, auditeur/trice ou magistrat(e), et votre sujet ne figure pas dans l’article ? Faites-le moi savoir : je lui ferai rejoindre ses compagnons un peu plus haut !
Encore une très bonne idée de ta part. J’ai hâte de connaître les autres sujets pour compléter mes révisions.
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Ils arrivent! Les sujets de droit européen sont dans les tuyaux… La rentrée à l’enm a un peu ralenti mes capacités de rédaction mais je vais m’y remettre 🙂
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Merci pour cet article précieux ! Avec la réforme du concours, en 2020, nous devons choisir entre DIP, DUE et droit administratif pour l’un des oraux techniques. Selon toi, il est toujours raisonnable de choisir le DIP ? J’ai bcp de doutes, et le choix doit se faire au moment de l’inscription au concours. Je suis preneuse de tout conseil quant au choix entre ces 3 matières !
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Bonjour à toi Manon! En effet, la matière de l’oral technique peut désormais être sélectionnée à l’avance, ce qui ôtera l’angoisse d’avoir une multitude de programmes à s’enfiler. A vrai dire, si tu as fait beaucoup de DIP et que tu le sens bien, cela peut être un bon choix parce que la matière a un champ relativement restreint et balisé, en comparaison avec le droit administratif et surtout le gigantesque droit européen. Je ne connais pas tes compétences en ce domaine, donc je suis bien en peine de te conseiller l’une de ces trois matières, mais à mon avis il n’y a aucun « piège » là-dedans : choisis celle avec laquelle tu te sens la plus à l’aise, sachant qu’avec le Meyzeaud-Garaud bien avalé on peut s’en sortir sur 95% des sujets… Bonne préparation à toi!
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